01 mai 2014

Dili dilili dililili ding dong Petite agression urbaine

Lodile est entrée sur la terrasse. Elle a la respiration rapide, le souffle haletant. Moi Loizo je m'apprête à l'écouter.
Bonjour Loizo, si tu savais si tu savais
je ne donne pas de réponse. J'écoute. Elle me raconte. Je comprends qu'elle attendait le bus dans l'abri bus. Qu'il était 19 h. Qu' elle a remarqué, traversant le passage piéton, un sportif brun, longiligne et sec, 185 cm, marcel gris dénudant ses épaules et bras musclés marchant lentement. Qu'il était vêtu d'un pantalon plutôt sombre et portait quelque chose à la main droite. Elle continue...
"Il m'a regardé avec insistance" dit-elle, "j'ai trouvé son calme bizarre. Quand le bus est arrivé je me suis avancée. J'ai cru qu'il allait monter.  Il m'a laissé passer et sitôt après, toujours calme mais  grommelant,  il a projeté quelque chose à l'intérieur du véhicule en tutoyant la conductrice et en utilisant le mot "bus". 
La conductrice s'est rejetée en arrière. Si elle n'avait pas eu cette présence d'esprit, la bouteille l'aurait touchée au visage.  Le temps de se rendre compte qu'elle avait du liquide sucré plein les bras et les vêtements, elle s'éberluait. Je n'ai jamais remarqué cet homme dans le quartier. 
La conductrice a averti son service. Plus le temps passait plus sa peau rougissait, visage et décolleté. Elle était en état de choc.  M'a-t-elle demandé où lui ai-je proposé, je suis restée auprès d'elle. 

Quatre jeunes hommes de bonne taille sont passés, goguenard. A notre hauteur, l'un d'eux, railleur, nous a regardées en disant "Alors, qu'est-ce qu'elles ont les filles, les filles du sud ?" (pourquoi sud ?) J'ai pensé qu'ils avaient croisé l'agresseur et échangé avec lui quelques propos. 
Le responsable a pris mes coordonnées. J'ai pris le bus suivant. C'était un homme qui le conduisait. Pourquoi a-t-il dit à sa collègue 
"Qu'est-ce que tu as trouvé pour te faire remarquer ?"
J'ai trouvé cette réflexion choquante. 
Tu vois Loizo, je réfléchis, je n'ai pas aimé cette plaisanterie. C'était mal placé. J'étais là. J'aurais pu recevoir cette bouteille. Je me suis même demandé si un temps, ce n'était pas à moi qu'il l'avait destinée. Et je me demande
"Qu'aurait fait un conducteur ? 
Aurait-il apprécié ce geste au point de féliciter l'agresseur ? 
L'aurait-il poursuivi ? 
Aurait-il continué son travail sans intervention extérieure ?
Un collègue lui aurait-il fait cette réflexion ?
Je venait de travailler l'angle de vue de la célèbre histoire 
"Qu'est-ce que les femmes désirent le plus au monde ?" j'ai pensé qu'aujourd'hui, il n'était toujours pas facile aux femmes de se défendre ou mieux, de se faire défendre.
J'ajoute que, homme ou femme, il est inadmissible d'accepter qu'un être humain, quel que soit son sexe, se fasse agresser par un autre être humain, qu'il soit ou non au service de la collectivité mais encore plus quand il est au service de la collectivité.  T'en penses quoi Loizo ? Tu ne réponds pas ?"
Non, je ne réponds pas. Mais qui ne dit mot consent. 
Quant à vous qui lisez, puisque Loizo reste muet, ne restez pas silencieux. Donnez votre avis. Et si vous avez besoin de vous remettre, évitez le coca et prenez une tisane, un citron-menthe chaud, un sirop d'orgeat glacé ou tout simplement une vodka. C'est à votre portée, sous la feuille de bardane, auprès du bassin, sous le palmier de Loizo. Chevélé.