06 juin 2009

Pauvre nocturne à la sardine bleue de La Turballe : Dililin dilililing ding ding, tiens tiens Vl'à Lodile

"Je vais m'y faire, Loizo, je vais m'y faire, mais je dois te dire que j'ai du mal. Vois-tu Loizo, je travaillais à ce que j'aime, la parole. Je prends conscience que quelque chose me gêne, au point de me donner des nausées, je m'interroge. Ma cuisine brûle-t-elle ? J'y fonce. Etat de cuisine normale. Tout me semble normal. Je retourne dans mes apparts, côté rue. Les pneus des véhicules jouent les glissando avec la pluie. Cette musique humide ne me gêne pas, elle rythmerait plutôt la musique de mes phrases. Je recommence à parler, modérément cependant, à voix haute, montre en main. Mes nausées reviennent. Quand, je ne sais pourquoi, les sardines de La Turballe, découvertes au marché le matin même, m'apparaissent en tête. Je les trouvais admirables, belles à offrir à mon objectif. Carte mémoire oubliée. Ma pupille s'est nourrie de leurs reflets. Ma vision me laisse croire que je me nourris pour de vrai. Et vrai de vrai, à l'instant T je comprends que je me nourris des sardines grillées par quelques voisins du 1er. Après la fumée de leur cigarette des 4 heures du mat, avant d'aller dormir, voici venu le temps de la sardine de Turballe de 23 h 46. Pour ne pas enfumer leur chambre et salon, tout se passe sur leur balcon mais pénètre sans recul dans ma chambre et mon salon. Loizo, si ça continue..." Elle a dit cela d'une traite. Je l'arrête légèrement inquiet "Tu ne vas pas créer un événement Lodile ?" "Pas le moins du monde Loizo, je vais juste partager un thé à la vanille avec toi" et elle éclate de rire en disant comme si elle récitait "Examiner les choses à neuf. Comme si rien n'allait de soi. Penser que, si les choses sont, elles auraient tout aussi bien pu être autres, ou même, ne pas être. Se décaler. Se déphaser. Se distancier un maximum. Ne plus adhérer à rien. S'exercer à douter de tout. Ne rien prendre pour acquis - et encore moins, pour légitime. " Elle se marre. Je décide de rire avec elle. Et nous nous servons le thé à vanille. Délicieusement différent de la sardine grillée à 22 h 37, fut-elle de La Turballe, et à ne plus la sentir. "Tu vois Loizo, je m'y suis faite !"

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