30 mai 2007

Un père, dit-il, qu'est-ce que c'est ? (3)

... "Le passeur s'assit sur une pierre, près de sa barque. Sa voix vint de moins loin dans la nuit. Mais il avait eu d'abord une sorte de petit rire. "Un père, Eh bien, celui qui te prend sur ses genoux quand tu pleures, et qui s'assied près de toi le soir lorsque tu as peur de t'endormir, pour te raconter une histoire." L'enfant ne répondit pas. "Souvent on n'a pas eu de père, c'est vrai, reprit le géant comme après quelque réflexion. Mais alors il y a ces jeunes et douces femmes, dit-on, qui allument le feu, qui vous assoient près de lui, qui vous chantent une chanson. Et quand elles s'éloignent, c'est pour faire cuire des plats, on sent l'odeur de l'huile qui chauffe dans la marmite. Je ne me souviens pas de cela non plus", dit l'enfant de sa légère voix cristalline. Il s'était approché du passeur qui maintenant se taisait, il entendait sa respiration égale, lente. "Je dois passer le fleuve, dit-il. J'ai de quoi payer le passage." Le géant se pencha, le prit dans ses vastes mains, le plaça sur ses épaules, se redressa et descendit dans sa barque, qui céda un peu sous son pids. "Allons, dit-il. Tiens-toi bien fort à mon cou !" D'une main, il retenait l'enfant par une jambe, de l'autre il planta la perche dans l'eau. L'enfant se cramponna à son cou d'un mouvement brusque avec un soupir. Le passeur put prendre alors la perche à deux mains, il la retira de la boue, la barque quitta la rive, le bruit de l'eau s'élargit sous les reflets, dans les ombres. Et un instant après un doigt toucha son oreille. "... à suivre"

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